Des avant-gardes des années 1920 à l'Expanded Cinema des années 1960 jusqu'au cinéma d'exposition contemporain, le destin des images en mouvement n'a cessé de croiser celui des arts plastiques. Le film n'est pas seulement une extension de la photographie au mouvement et au temps, il est tout autant ouvert à la peinture, à la sculpture ou au dessin ; l'écran n'est pas seulement une fenêtre derrière laquelle se déploie une profondeur fictive, mais une surface d'inscription sur laquelle viennent jouer des effets que l'histoire de l'art plus que l'histoire du cinéma nous a appris à reconnaître et à nommer.

En dissociant, déplaçant ou réagençant les propriétés du film, la tradition expérimentale moderne et contemporaine nous révèle sa dimension essentiellement plastique : elle nous apprend à voir dans le défilement, la projection ou le montage non les instruments de la construction d'un monde d'illusion, mais des dispositifs et des agencements. Animer des surfaces, produire des causalités irréelles, organiser la transformation des images en corps et des corps en images, faire apparaître et disparaître des figures ; délivrées de leur fonction de reflet, les images de cinéma, non fixées et lacunaires, apparaissent pour ce qu'elles sont : des déterminations instables visant non pas à reproduire le réel, mais à le transformer.

Ce livre rassemble une série de monographies consacrées à des œuvres majeures de la collection des films du Centre Pompidou-Musée national d'art moderne : écrites par des historiens de l'art ou du film et largement illustrées, ces études jettent un pont entre l'histoire du film expérimental telle qu'elle s'est développée tout au long du XXe siècle et la pratique des artistes-cinéastes contemporains, et apportent un nouvel éclairage à la question des images en mouvement en la déplaçant du champ restreint de l'histoire du cinéma à celui, élargi, de l'histoire de l'art.